La Fédération Guinéenne de Football traverse une nouvelle zone de turbulences. Après la révocation de son président Bouba Sampil par ses pairs, c’est désormais l’agrément de l’institution elle-même qui est remis en cause par les autorités. Dans une démarche à la fois administrative et politique, le ministre des Sports, Lansana Béa Diallo alias Bogola Haba, a officiellement annoncé l’expiration de l’agrément de la FGF, appelant à une mise en veille des activités de l’instance dirigeante du football national.
Une expiration annoncée par la loi
Le fondement juridique de cette décision repose sur l’article 2 de l’arrêté d’agrément de la FGF en date de 2023. Celui-ci stipule que :
« Le présent arrêté qui a une durée de deux (02) ans renouvelable sera considéré automatiquement expiré, si avant la fin des trois (03) mois consécutifs à l’échéance, la FGF n’aura pas demandé le renouvellement de son arrêté. »
Autrement dit, la Fédération avait jusqu’à trois mois après l’échéance pour introduire une demande de renouvellement, sans quoi l’agrément devient caduc. Or, à ce jour, aucun document officiel ne prouve que la FGF s’est conformée à cette exigence dans les délais impartis.
C’est donc en s’appuyant sur cette disposition réglementaire que le ministre a pris une position ferme pour annoncer que désormais, aucun acte administratif, financier ou organisationnel émanant de la FGF ne sera reconnu par l’État guinéen sans autorisation expresse du ministère en charge des Sports. L’État suspend également toute prise en charge des activités de la fédération, sauf en cas d’exception dûment autorisée.
Un ministère à la fois arbitre et acteur…
Cette sortie du ministère intervient dans un contexte de crise institutionnelle profonde, marqué par des luttes internes au sein du Comité exécutif. Le timing interroge : est-ce une volonté de rétablir l’ordre et l’autorité de l’État sur les fédérations sportives ? Ou une manœuvre pour reprendre la main sur une fédération fragilisée ?
Si l’intention affichée est celle du respect des textes et de la stabilité, l’effet produit pourrait paradoxalement creuser encore davantage les fractures entre les acteurs du football guinéen. Le ministère se positionne ainsi à la fois comme garant de la légalité et comme acteur influent dans le futur de la FGF.
Cette intervention, bien que juridiquement fondée, pourrait être interprétée comme une ingérence dans les affaires internes du football, ce qui va à l’encontre des principes défendus par la FIFA. L’instance mondiale du football, très vigilante sur l’autonomie des fédérations, pourrait réagir si elle estime que l’indépendance de la FGF est compromise. Le précédent de suspensions passées de la Guinée pour des motifs similaires n’est pas à négliger.
La situation actuelle place le football guinéen à la croisée des chemins. L’enjeu dépasse le simple renouvellement administratif, il s’agit de restaurer la crédibilité et la gouvernance de la FGF, sans tomber dans le piège des ingérences ni des jeux de pouvoir internes.
La balle est désormais dans le camp des acteurs sportifs, pour éviter que le terrain sportif ne soit de nouveau déserté, faute d’un arbitre crédible.