Dans un témoignage bouleversant, Saliou Diallo, entraîneur de l’équipe de Labé, livre un récit glaçant de ce qui semblait être une simple rencontre sportive, mais qui s’est transformée en un véritable drame. Selon ses propos, ce qui devait être une finale de football animée s’est soudainement métamorphosé en un drame inouï, marqué par la violence, la panique et des pertes humaines tragiques.
Le témoignage commence par une évocation de l’atmosphère d’une rencontre sportive classique. L’entraîneur, Saliou Diallo, décrit le début du match comme étant une expérience habituelle sur le terrain, avec une ambiance enjouée et une compétition suivie par une foule enthousiaste.
« Je pensais être sur un terrain de foot où l’ambiance règne comme toujours quand tout a changé en drame dans une débandade qui ne dit pas son nom. Personne ne savait plus par où aller ni où pour se sauver ».
L’entraîneur poursuit en évoquant les moments où l’escalade de la tension commence à se faire sentir, notamment à travers l’attribution de deux cartons rouges aux joueurs.
« A la première mi-temps, l’arbitrage s’est bien passé, l’arbitre s’est bien comporté. La deuxième mi-temps également, tout a bien tourné jusqu’aux 15 dernières minutes, à la 75ème exactement. Nous avons 2 cartons rouges en un laps de temps. En dépit de tout, nous avons œuvré pour que les joueurs expulsés soient dehors.
Au même moment la tribune était pleine, le ministre Félix Lamah est venu intervenir lui-même pour baisser la tension. Il a plaidé pour que l’arbitre annule l’un des cartons rouges. Ce qui fut fait. Le match a continué. Nous étions à égalité zéro but partout. A la fin des 90 minutes, nous avons bénéficié de 4 minutes de temps additionnel, malheureusement nous avons joué un peu plus sans que l’arbitre ne siffle la fin du match. La balle vient dans notre camp, mon défenseur renvoie le ballon au centre par un coup de pied. C’est là que l’arbitre siffle un penalty avec l’argument que le joueur du camp adverse a été touché. Il est parti chercher le ballon au centre pour le ramener. C’est au moment où chacun cherchait à comprendre ce qui se passait, que les pierres ont commencé à pleuvoir de partout sur le terrain. Personne ne savait d’où ça venait, nous étions désormais au beau milieu du terrain. La cour du stade est grande, la clôture élevée, les femmes et les filles très nombreuses y compris des adolescents. C’est la débandade qui éclate avec une panique. Des milliers de personnes étaient là pour suivre la finale. La sécurité riposte avec du gaz lacrymogène qui se mêle aux jets de pierre. Nous et les joueurs, sommes restés au milieu du terrain ; les ministres nous ont rejoints.
Tout pouvait nous arriver ensemble. Ceux qui ont tenté de sortir ont trouvé que le grand portail était fermé, la petite porte était le seul recours. Beaucoup ont voulu passer par là. Avec la débandade, les bousculades, beaucoup ont laissé leur vie. C’est la première fois dans ma vie de voir plus de 30 corps sont alignés dans un stade alors que d’autres sont ramassés pour la morgue. En dépit de tout l’intifada a continué. Nous sommes restés dans le stade jusque tard la nuit sous la protection des agents de sécurité, finalement ils nous ont dit de partir qu’ils ne peuvent plus rester là alors que le commissariat est incendié à côté, un véhicule de sécurité ciblé. Nous sommes descendus pour partir, mais il fallait faire le mort et s’allonger un moment de peur d’être attaqué directement, c’est entre temps que du renfort est venu du camp pour nous exfiltrer de là avec tous les ministres en direction du camp. Nous sommes encore là depuis hier. Ce que j’ai vu hier m’a fait peur vraiment, tu vois un corps, les gens viennent le marcher dessus pour fuir. Nous sommes traumatisés à l’heure qu’il fait. Si on savait que la fin allait être ainsi, on aurait délaissé pour perdre le match parce qu’il n’y a aucune raison qu’un être meurt à cause du football. Au début je voyais les gens comme des asphyxiés, mais par après chacun se rend compte que c’est des morts qui sont là. Imaginez des personnes qui n’ont jamais vu un mort et ils voient des dizaines alignées. Ce qui a fait que beaucoup d’autres se sont coincés dans des petits coins notamment à la porte de sortie. Je suis attristé par ce qui est arrivé, des garçons, des filles avec plein d’espoirs de vie se retrouvent dans un cercueil. Ce n’était pas souhaité du tout. Des familles en larmes, des morts qui ne savent pas ce qui les a tués. Les mosquées et les hôpitaux sont pleins de corps. Mes condoléances aux familles et prompt rétablissement aux blessés », témoigne Saliou Diallo dit coach Meny entraîneur de l’équipe de Labé, à Africaguinée.