Le sport a généralement bonne presse, d’autant plus en ce début d’année où pleuvent encore les bonnes résolutions. On est toujours un peu coupable de « ne pas faire du sport ». Pourtant, certaines pratiques du sport sont très éloignées d’une quelconque forme d’éducation au bien-être. Ainsi, en filigrane des différentes contributions de ce numéro domine l’idée que la pratique sportive n’est pas sans risque dès lors que le culte de la performance structure notre rapport au monde. Tandis que certains adeptes en deviennent dépendants, d’autres n’hésitent pas à « se booster » le corps au mépris de la préservation la plus élémentaire de leur santé. Or, malgré les multiples trajectoires de vie brisées par « excès de sport », son étoile semble ne jamais pâlir. Son aura est à la mesure de l’engouement que suscite sa mise en spectacle auprès des foules. Nous en prenons pour preuve la conception dominante du dopage qui l’assimile à la déviance, produit d’une conduite délinquante, toujours le fait du tricheur, du traître au « fairplay », agent extérieur au monde sportif venu corrompre le modèle de pureté et d’excellence loué aussi bien par les institutions sportives que le discours politique. Dans ces conditions, la prévention du dopage se résume quasi exclusivement au dépistage et à l’exclusion. Le dopé est celui que l’on débusque et exclut, jamais vraiment celui que l’on accompagne, soutient et oriente. Pourtant, à y regarder de plus près, on pourrait facilement retourner le problème en envisageant la personne dopée, non pas comme un être déviant, mais plutôt comme un « être surinvesti » dans un système où la performance fait office de valeur cardinale. Plusieurs auteurs nous rappellent que sur ce point, la Belgique est loin de se démarquer positivement. Ici comme ailleurs, la prévention vise moins à s’occuper des sportifs qu’à préserver intact l’idéal sportif.
C’est donc à travers les rapports difficiles qu’il noue avec la dépendance que Prospective-Jeunesse a choisi d’interroger le sport. Une relation tantôt mortifère, tantôt vertueuse ainsi que nous le démontre le travail quotidien de l’Asbl La Trace où le sport – à risque, de préférence – s’envisage comme une ressource potentielle à investir pour se défaire d’une dépendance problématique. De quoi – espérons-le – détourner le lecteur de la figure mythique de l’athlète, parangon de vertu, sans pour autant le dégoûter du sport consommé avec modération.
Une fois n’est pas coutume, nos vœux de bonne année ne peuvent faire l’impasse sur une petite mise au point quant à la réception du précédent numéro de la revue consacré à l’abstinence. Il va de soi que nous déplorons le fait que certains travailleurs de la Réduction des risques se soient sentis insultés par les propos tenus dans une interview. Cela étant dit, Il nous tient à cœur de rappeler que tous les articles publiés dans la revue reflètent les opinions de leur(s) auteur(s) et pas nécessairement celles des responsables de la revue. Par ailleurs, nous insistons sur le fait que chaque numéro aborde une thématique spécifique sous des regards différents, parfois contradictoires mais toujours dans un souci d’équilibre, et ce d’autant plus si le thème choisi est politiquement sensible. Il importe dès lors de ne pas sortir un article de son contexte. Gageons que la lecture du numéro dans son entièreté permettra d’effacer les doutes pouvant encore exister dans le chef de certains de nos lecteurs.